Enceinte de Bressilien
Les fouilles menées sur l’habitat fortifié gaulois de Saint-Symphorien ont révélé la présence d’une occupation médiévale bien marquée sur le territoire de Paule. En remontant le captage d’une source, les archéologues ont découvert les vestiges d’une chapelle du haut Moyen Âge. Ils se sont dès lors intéressés à un vaste enclos de 5 hectares, situé à quelques centaines de mètres en contrebas, au lieu-dit Bressilien.
Paule central
Pendant très longtemps, de sa fondation jusqu’au milieu du XXème siècle, l’enceinte de Bressilien s’est érigée dans le paysage de Paule. Elle fut intégralement rasée au cours de vastes opérations de remembrement effectuées dans les années 1960. De nombreuses interprétations lui furent prêtées dès le XIXème siècle, à commencer par Paul Du Chatellier, qui y voyait un possible camp romain.
Les études et fouilles récentes ont finalement révélé les vestiges d’un habitat fortifié, dont l’installation remonte aux VIème-VIIème siècles de notre ère. L’habitat découvert est cerné d’un profond fossé de 2,60 m, suivi d’un rempart de terre et de bois, supportant probablement un chemin de ronde. Les accès sont particulièrement bien protégés. C’est notamment le cas en partie basse de l’enceinte : un chemin creux, bordé d’un muret, débouche sur une tour-porche qui sécurise l’accès au domaine.
L’enceinte se divise en deux parties distinctes. Une partie basse, regroupant les principales activités artisanales et agricoles, et une partie haute, où se développent, entre autres, les bâtiments résidentiels du maître et de sa famille, ainsi qu’un espace de forge. Dans l’ensemble de l’habitat, d’importants silos à céréales (plusieurs mètres cube chacun) constituent de grandes réserves de stockage. Plusieurs fours utilisés pour le séchage et le grillage du grain ont également été découverts, ainsi que des meules destinées à broyer les céréales pour leur transformation en farine.
L’habitat fortifié de Bressilien n’est pas isolé et forme le cœur d’un très vaste domaine. Plusieurs sites fouillés en périphérie de l’habitat ont directement dépendu de ce riche et puissant domaine : c’est le cas de la chapelle de Saint-Symphorien, située à 300 mètres au nord-est de Bressilien, mais aussi d’un atelier de réduction du minerai de fer, situé à 400 mètres au nord, au lieu-dit Kersaint-Eloy. Ce dernier devait fabriquer des lingots alimentant les différentes forges du territoire. L’étude de l’ensemble de ces sites permet donc une compréhension globale de l’occupation de ce secteur.
Melting-pot
La question des liens matériels, économiques et culturels entretenus avec les différentes communautés d’outre-Manche est prééminente au sein des différents sites fouillés à Paule.
L’absence de céramique révèle par exemple des similitudes avec certaines régions de Grande-Bretagne et d’Irlande, au sein desquelles l’utilisation de la vaisselle en bois, métallique, ou encore de la vannerie, est globalement majoritaire. Une cloche à main, possiblement d’origine irlandaise, ainsi qu’un fragment d’objet religieux décoré d’entrelacs celtiques, témoignent du type d’objets en usage, au IXème siècle, au sein de la chapelle Saint-Symphorien. Ces derniers supposent peut-être l’origine de certains pèlerins, mais précisent surtout les liens culturels et religieux existants entre les habitants de Bressilien et les communautés insulaires.
Fragment de coupe en verre trouvé sur le site de Bressilien et sa reconstitution archéologique. Etude et photo de F. Labaune-Jean (INRAP), reconstitution F. Arnaud (Atelier PiVerre)
Les liens matériels et économiques ne se limitent toutefois pas à un territoire proprement breton (Grande Bretagne et péninsule armoricaine). L’exploitation de l’avoine sableuse, mise en évidence à Paule, témoigne de l’appropriation d’une céréale d’origine scandinave. Le fragment d’une coupe en verre richement décorée révèle aussi l’importation de productions issues d’Europe du nord. A côté de cela, l’influence franque se fait également sentir, en particulier à travers l’usage de monnaies carolingiennes.
- Site de Bressilien
Propriété privée.
Site inaccessible au public.
- Site de la chapelle Saint-Symphorien
Propriété publique.
Site accessible au public.
P. Guigon, Les fortifications du haut Moyen-Âge en Bretagne, éd. Centre régional d’archéologie d’Alet, Rennes, 1997
F. Labaune-Jean, J. Le Gall, F. Arnaud, « Le fragment de verre décoré du site de Bressilien (Côtes-d’Armor), dans Aremorica, 5, Brest, 2012
J. Le Gall, « Une résidence aristocratique des VIIIe-IXe siècles au cœur de la Bretagne. L’enceinte de Bressilien à Paule (Côtes d’Armor) », dans P.-Y. Laffont (dir.), Les élites et leurs résidences en Bretagne au Moyen Âge, Actes du colloque de Guingamp et Dinan (28 et 29 mai 2010), PUR, Rennes, 2014
G. Sarah, J. Le Gall, Y. Ménez, « Les sites d’occupation du haut Moyen-Âge de Saint-Symphorien et de Bressilien à Paule (Côtes-d’Armor). Synthèse des campagnes 2008-2010 et étude pluridisciplinaire du matériel monétaire », dans The Journal of Archaelogical Numismatics, 1, 2011, pp. 217-236